L’association Solidarité Turque de Terrasson condamne très fermement les attentats du 13 novembre à Paris et exprime sa solidarité et son désarroi devant ces actes innommables qui ont fait des victimes absolument innocentes. L’Imam Adem Sahin (au centre sur la photo) est arrivé il y a un mois et demi de Turquie à la mosquée de la Borie basse. Il est en poste pour quatre ans. Il répond à quelques unes de nos questions. Des propos traduits par Ali Odabasioglu, secrétaire de l’association solidarité Turque de Terrasson, et Ismail Boz (respectivement à droite et à gauche sur la photo).
Ewanews : quel est votre ressenti après les attentats du 13 novembre ?
Imam Adem Sahin : « Je remets mes condoléances à toutes les personnes qui sont décédées dans cet attentat et je suis très, très inquiet. Qu’il y ait autant de victimes nous met mal à l’aise. Le 12 octobre dernier, il y a eu un attentat à Ankara faisant malheureusement 102 morts et plus de 500 blessés. Le 12 juillet dernier, il y a eu un autre attentat à l’ouest de la Turquie avec 34 morts et plus de cent blessés. Et puis encore un autre attentat… C’est toujours la même organisation terroriste qui a perpétré tous ces attentats. Le terrorisme est très présent sur notre territoire. Donc, nous sommes déjà habitués à ce nombre de victimes et d’attentats, à cette douleur, on est malheureux. Après l’attentat à Paris, on ressent en fait exactement la même douleur que les Français. On est l’une des populations les plus proches des Français. On a déjà vécu tous ces attentats. On a tué vraiment des gens innocents ».
Ewanews : la France et la Turquie, ces deux pays sont-ils concernés par le même problème ?
Imam Adem Sahin : « C’est cela, exactement. Depuis à peu près 30 ans, la Turquie a des problèmes avec l’organisation terroriste, en sachant que la Syrie est en frontière avec nous. Nous avons eu près de 30.000 morts à cause du terrorisme. On est donc très concerné par le terrorisme, d’où le point commun avec la France. Le terrorisme n’a aucune religion, ni aucune nationalité d’origine ».
Ewanews : quelles sont les différences entre vous et le terrorisme ?
Imam Adem Sahin : « Il est hors de question que l’on soit ami, et que l’on aide… Etre ami avec les terroristes, c’est impossible. D’où il vient, et de qui ça provient, nous on le rejette et on le maudit. Notre vie dépend du Coran. Et dans un verset du Coran, il est bien dit que celui qui sauve une vie sauve l’Humanité, et que celui qui tue une vie tue le monde entier. Nous, on vit par rapport à ces versets-là. Les personnes qui ont perpétré ces attentats, on ne les voit pas comme des musulmans. Ce ne sont pas des musulmans. C’est leur vision qu’ils utilisent au niveau politique pour pouvoir salir l’islam. Ils utilisent l’islam comme un outil. Ils essayent d’illustrer leur mouvement politique, si je puis dire, avec l’islam. Ils n’ont vraiment aucun lien avec les musulmans. Un musulman ne tue pas des personnes innocentes, comme ça, ce n’est pas possible. La vraie définition du mot islam, c’est la paix. Nous en tant que Turcs, ont est très tristes de ces faits. Et les gens qui viennent faire leur prière à la mosquée, ils sont tous d’accord sur ce sujet-là. L’objectif d’un musulman est de travailler, nourrir sa famille, éduquer ses enfants et de pratiquer sa religion. »
Ewanews : Y-a-t-il des personnes dans la région qui penchent vers le radicalisme ?
Imam Adem Sahin : « On n’a jamais eu de personnes comme ça. On n’a pas eu de contact avec des personnes radicalisées. De toutes façons, ces personnes-là ne sont pas acceptées ici. Ils n’ont pas de place dans notre mosquée. Si on sait que c’est des gens comme ça, on leur dit franchement que l’on est contre eux. Ce n’est jamais arrivé. Je crois qu’une fois il y a eu un refus mais je ne peux pas dire exactement. Notre but, c’est d’être en paix avec tout le monde, tout ce qui est loi et réglementation. Il est dit que l’on doit respecter les lois du pays où vous vivez ».
Ewanews : Etes-vous ouvert à la population et souhaitez-vous mieux communiquer ?
Imam Adem Sahin : « Nous voulons que les gens de Terrasson viennent à notre mosquée. Comme vous voyez, on vous offre le thé, le café, pour discuter, pour dialoguer. Cela nous ferait plaisir de voir les habitants venir voir notre mosquée. Il y a des habitants qui ne sont jamais venus. Après, on comprend les habitants, que l’on peut avoir des idées vu ce qui se passe au niveau des média, ils ont toujours des idées à eux. Donc, nous, ce qu’on leur dit, on aimerait bien les rencontrer et on est toujours ouvert aux discussions. La seule chose que l’on veut, c’est de vivre en paix avec la population française. On prévoit d’ici la fin de la semaine de programmer un rendez-vous avec le maire de Terrasson, M. Pierre Delmon, pour pouvoir discuter des faits qui se sont déroulés. Que vous soyez venus pour nous interviewer, cela nous a fait beaucoup plaisir et, en aucun cas, nous ne voulons que le peuple français nous regarde d’un autre oeil. Nous voulons vivre en paix et entre amis, comme d’habitude. J’espère que les événements qui se sont déroulés ne sous sépareront pas ».
Pour refermer l’interview, l’imam lit deux extraits du Coran : « ne tuez pas la personne humaine, car Allah l’a déclarée sacrée » et « celui qui a tué un homme qui n’a commis aucune violence sur terre, ni tué, c’est comme s’il avait tué tous les hommes ».
Propos recueillis par Alain Rassat, le mardi 17 novembre 2015 à Terrasson.