Rencontre avec la mosquée maghrébine de Terrasson

Pour le week-end « portes ouvertes » des 9 et 10 janvier 2016, la mosquée maghrébine de Terrasson aurait bien souhaité participer à cette opération, mais en raison des travaux en cours, cela n’a pas été possible. Et puis, la mosquée ne dispose pas encore d’un imam fixe. Cependant le président de l’association Trait d’Union Terrasson, qui fédère les moyens de réaliser la nouvelle mosquée, Ahmed Gartani, voit d’un très bon oeil cette initiative du Conseil français du culte musulman (CFCM) : « C’est bien, cela permet aux gens de venir et de voir ce qu’est réellement l’islam. » Après la visite du bâtiment en construction, c’est autour d’un café que s’est poursuivi notre échange, lequel ne pouvait faire l’économie d’un retour sur les attentats de 2015 à Paris, comme en tant d’autres lieux du monde.

« Nous sommes les premières victimes de ces événements. Ce n’est plus comme avant. Quand nos femmes ou nos soeurs vont en ville, elles sont parfois mal vues. On est des Maghrébins ou on est Turc, bref on est identifié déjà à l’islam. Je crois que c’est la religion qui est mal vue par les gens et c’est ça l’amalgame » souligne Ahmed Gartani… « L’âme de l’être humain est très chère à Dieu. Qu’il soit athée, chrétien, juif, musulman, bouddhiste, l’être humain a une âme qui est chère pour Dieu. Donc si elle est chère, c’est que l’on a l’interdiction d’aller tuer quelqu’un. L’islam, c’est le bon comportement. Et si par exemple, on ne s’entend pas avec quelqu’un, on le laisse, et on n’a pas à aller le frapper ou le tuer. Notre religion, c’est la tolérance, la sagesse, la piété, la crainte de Dieu. Et si l’on craint Dieu, on doit écouter ses paroles et avoir un bon comportement. Quand on voit des fous qui font ça, ce sont des barbares qui ne connaissent rien du Coran. S’ils connaissaient l’islam, ils ne feraient pas ça… »

De son côté, Alaoui  Hichem, le trésorier adjoint de l’association Trait d’Union, explique : « sur les terrasses de café à Paris, il y avait trois jeunes étudiants marocains en école d’ingénieurs. Un a survécu, deux sont décédés. Ces trois jeunes se sont donné rendez-vous pour boire un café, un vendredi soir à 9h30. Et c’était leur première année en France. D’autres Maghrébins et Turcs font aussi partie des victimes des attentats ».

Ahmed El Guerouazi, membre de l’association, ajoute à son tour que « la France, c’est un beau pays, et tous ceux qui veulent du mal à ce pays, ils veulent du mal à moi. D’ailleurs ces gens-là, il faut les appeler des assassins, pas des islamistes. Ils n’ont rien à voir avec l’Islam. Ils portent le Coran comme ça, à bout de bras, mais ils ne l’ont jamais ouvert. C’est leur famille qui le dit. Pourquoi ils salissent la religion ? Cela fait 40 ans que je vis en France. Je respecte les gens et ils me respectent ».

Et à Terrasson, est-ce que des personnes pourraient avoir de mauvaises pensées ?… « Franchement, à Terrasson, tous ceux que je connais sont contre. Maintenant, on n’est pas responsable de chaque personne ». L’un d’eux reconnaît, en effet, que « quelqu’un peut être bien dans sa tête aujourd’hui mais on ne sait pas demain ». A propos des perquisitions menées à Terrasson dans le cadre de l’état d’urgence, il précise sa pensée : « les gendarmes font leur travail mais les jeunes visés, on les connaît. Combien cela a coûté ce déplacement à cinq ou six voitures, et comment vont-ils être maintenant regardés par les voisins ? Si l’on peut éviter ces actions et trouver des solutions avant que cela n’arrive… »

Plus d’efforts pour les jeunes

La nouvelle mosquée, outre le fait d’offrir un beau site au plan architectural, apportera sans doute un « plus » à la communauté et aux jeunes de la cité. « Quand on dit que des jeunes ne sont pas assez intégrés, c’est que l’on ne fait pas assez pour ces jeunes, à commencer par nous, » dit le président de Trait d’Union. Le chômage est, pour lui, le problème numéro 1. « La plupart des jeunes ont des diplômes de tous les niveaux et sont partis dans les grandes villes. Certains s’en sortent. Quand on voit ce qui se passe aujourd’hui, la grande responsabilité vient de nos politiciens. Il manque des lieux pour ces jeunes, pour faire des activités. La commune ne s’intéresse pas à ces gens. On a demandé d’ailleurs un rendez-vous à la mairie depuis deux mois et on attend une réponse ».

En attendant, la mosquée en travaux reste accessible. « Les gens n’ont qu’à se présenter et on leur fera visiter les travaux. On répondra à leurs questions, il n’y a aucun problème. Des conférences devraient y être organisées pour expliquer ce que veut dire notre religion, comment on doit se comporter dans notre religion par rapport aux autres. On souhaite aussi recevoir les responsables des autres communautés, que ce soit chrétiennes ou juives, cela ne  nous pose aucun problème. On aimerait bien savoir ce que pensent les gens de notre religion, peut-être que cela pourrait nous permettre de nous corriger aussi ».

La mosquée en construction

Le projet de création de cette mosquée a été validé pour une réalisation du bâtiment dans le lotissement de La Grande Borie. Comme c’est une zone inondable, il a fallu surélever toute la structure, même si, comme le remarque Ahmed Gartani, « l’eau ne sort plus à la digue ».  Chaque week-end,  les membres de l’association participent eux-mêmes à l’oeuvre de construction. Alaoui  Hichem, le trésorier adjoint de l’association, est aussi le chef de l’organisation des travaux. Son rôle est d’approvisionner le chantier pour que tout le monde ait du travail le samedi et le dimanche matin. « On ne travaille pas les jours fériés et on respecte le voisinage » dit-il. « Un architecte suit le chantier par téléphone et se rend sur place au moins une fois par mois ». La nouvelle mosquée sort de terre, petit à petit. En effet, les travaux durent depuis quatre ans et pourraient bien se prolonger encore, dans l’attente de moyens financiers. « Des moyens qui viennent seulement des membres de la communauté de Terrasson et des mosquées environnantes ». La mosquée, destinée à accueillir du public, sera entièrement aux normes, avec accès aux personnes à mobilité réduite. L’installation de toute l’isolation vient de débuter. Un plancher chauffant est envisagé. Des fenêtres ne sont pas encore installées aux étages. Et la réalisation d’un crépi de couleur crème, dans l’esprit du quartier, refermera le chantier. La grande salle des prières pourra accueillir trois à quatre cents personnes. Une aile du bâtiment sera réservée aux femmes. Et deux à trois petites pièces pourront accueillir une école d’arabe littéraire. Un parking avec place handicapés sera construit à l’arrière du bâtiment, côté Vézère. L’ensemble de la structure est déjà très impressionnant. Grâce au travail des nombreux bénévoles, « le coût total d’un tel édifice (sans doute près d’1 M€) devrait être divisé par deux ». Alain Rassat

Ahmed El Guerouazi, trésorier de l’associationTrait d’Union, est joignable au 07.83.57.94.73 pour ceux qui voudraient soutenir l’association.

Photo 1 : le président de Trait d’Union Terrasson : Ahmed Gartani

Photo 2 : des rails sont mis en place pour recevoir le plafond coupe feu

Photo 3 : L’échafaudage sur le minaret est  encore en place pour pouvoir installer des fenêtres et faire le crépi.


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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