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Montignac-Terrasson : une nouvelle jeunesse pour les vieux ponts

Les vieux ponts de Montignac et de Terrasson sont tous deux en travaux. Les chantiers, menés dans les règles de l’art, avancent à grands pas. De nouvelles pierres viennent remplacer celles qui portaient la marque des crues et du temps… Gros plan ici sur une restauration techniquement complexe de ces deux ouvrages qui enjambent majestueusement les eaux de la Vézère.

Le vieux pont de Montignac n’est pas très ancien. Sa construction a débuté en 1728 et ne fut achevée qu’en 1777, soit il y a moins de 250 ans. Contrairement à l’idée répandue à Montignac, ce pont aurait déjà bénéficié de travaux de restauration après la crue remarquable de 1960. Les travaux actuels entrepris en mars 2015 doivent se poursuivre jusqu’en septembre. Ils sont réalisés par l’entreprise Guy du Buisson-de-Cadouin. Les échafaudages seront donc en place jusqu’en septembre.

Le pont de Montignac étant inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, les travaux sont supervisés par l’architecte des Bâtiments de France. Lors de l’opération, 60 m3 de pierres dégradées sont remplacés en totalité par des pierres de forme et de nature équivalente venant de la carrière de Mauzens-et-Miremont. C’est l’une des deux seules carrières encore ouvertes, l’autre se situant aux Eyzies. Les différences de couleurs entre les pierres, que certains ont pu observer, proviennent d’un veinage présent dans le calcaire de la carrière d’où elles sont extraites. Les pierres sont solidarisées entre elles par des agrafes en inox afin de se prémunir contre les déformations du pont. Sous les arches du pont, une armature de grillage et de barres d’inox reçoit actuellement une projection de chaux hydraulique de Saint-Astier, ayant à la fois la faculté de durcir sous l’eau et de se recarbonater au contact de l’air. Ce traitement devrait assurer une bonne pérennité à l’ouvrage une fois les travaux réalisés.

Le problème principal rencontré sur ce pont est la conséquence d’une absence d’étanchéité du tablier de celui-ci, l’eau s’insinuant dans la structure inférieure et la dégradant. À ce phénomène est venue s’ajouter la fuite d’une canalisation d’eau qui a rapidement été résorbée par Véolia dès qu’elle a été détectée. Pour remédier à ce problème, des travaux de reprise du tablier seront engagés en février 2016, probablement pour profiter du niveau de circulation réduite à cette époque-là. Le roulement sera entièrement repris en vue de sa complète étanchéification. Ces travaux, sauf ceux relatifs au tablier qui sont à la charge de la commune, sont financés par le Conseil départemental de la Dordogne.

Terrasson : grès et calcaire pour la rénovation du Pont Vieux

Le pont vieux de Terrasson est caractérisé par ses arches, moitié en ogives, moitié en plein cintre, qui soulignent à la fois son ancienneté (XIIe siècle) et son histoire tourmentée, celui-ci ayant été en partie détruit durant les Guerres de religion (*). Depuis, il a fait l’objet de quelques campagnes de travaux durant les XVIIIe et XIXe siècles. Témoins de ces différentes interventions, les avant-becs des piles du pont sont de formes variables, le dernier avant la rive droite ayant conservé sa forme en bec pointu selon la méthode romaine, les autres possédant parfois ce caractère à leur base. Ce pont est un bâtiment classé aux Monuments historiques de France.

Les travaux actuels, entrepris depuis l’automne 2014, se poursuivront jusqu’en 2016. Une fois la première tranche de travaux terminée, la digue qui isole la moitié rive gauche sera basculée sur la deuxième partie du pont. Le chantier réalisé avec un financement de l’État, de la région Aquitaine, du Département de la Dordogne et de la ville de Terrasson, a été confié à l’entreprise Les Compagnons Réunis de La Bachellerie, dirigée par Georges Lafaye. L’entreprise périgordine a déjà assuré la restauration de l’église Saint-Sour.

La construction d’origine ayant eu recours au grès extrait sur place (dit araignée) et au calcaire (probablement le calcaire gréseux de Beauregard), ce sont des pierres de nature équivalente qui sont employées, soit du calcaire de Limeyrat et du grès d’Alsace, vert et rouge. Les pierres érodées sont extraites en totalité et remplacées par des pierres taillées aux mêmes dimensions à La Bachellerie, sur le site de l’entreprise. Les pierres du parapet seront renforcées par des agrafes en inox, scellées par de la résine afin de résister aux chocs des véhicules empruntant ce pont les jours de marché. Des forages ont été réalisés qui s’enfoncent dans la structure du pont et dépassent le niveau du socle rocheux du pont. Dans ceux-ci, l’on injectera du coulis dans le but de renforcer l’ensemble de la structure. Enfin, le roulement sera entièrement décaissé et refait à neuf. Le goudronnage actuel va disparaître pour laisser place à des pavés, les caniveaux d’écoulement des eaux et les avant-becs étant recouverts de calade similaire au pisé, mais constituée de galets. J-L. Kokel

Plus d’images du pont de Montignac (site de J.L. Kokel, photographe)

Plus d’images du pont de Terrasson (site de J.L. Kokel, photographe)


(*) Extraits du Bulletin de la Société historique et archéologique du Périgord, année 1904, tome 31, p. 101-144 : Pont ancien de Terrasson,  Ch. Durand

– « D’où nous déduisons qu’en 1182, un pont existait sur la Vézère à Terrasson ; que ce pont, soit dans un intérêt public, soit en vue de faciliter à l’abbaye l’exploitation de ses domaines de la rive droite, très vraisemblablement pour ces deux motifs , dut être construit à une époque d’importants travaux correspondant au commencement de la 2° partie du XIIe siècle, et enfin que, pour s’acquitter des dettes qui furent la conséquence de ce grand œuvre, l’abbaye de Terrasson, en 1178, à défaut d’autres ressources, vendit à celle du Dalon une partie de ses biens ».

– « A cette époque, deux voies importantes — grands chemins royaux — faisaient communiquer Limoges et le « Païs de France », avec Toulouse et les provinces du sud. L’une, par Brive et Cahors ; l’autre, par Montignac, Sarlat et Cahors. Terrasson se trouvait entre les deux, sensiblement à égale distance de Montignac et de Brive, sur la voie transversale qui, de Lyon, conduisait à Bordeaux par Tulle, Brive, la Forêt-Barade et Bergerac. Les communications directes entre Terrasson et Cahors pouvaient bien, sans doute, s’effectuer par Sarlat, mais en utilisant des chemins montueux, difficiles et le plus souvent inabordables, auxquels était préféré l’itinéraire par Montignac. Cet état de choses subsista jusqu’à l’époque où le pont de Montignac ayant été brûlé et rompu par le capitaine de Vivans, en mars 1580 ; seul, le pont de Terrasson permit la traversée, commode et sûre, d’une rivière à allure torrentielle, sujette à de fréquents débordements. (Malgré la destruction de son pont en 1580 par les troupes du protestant Geoffroy de Vigan, puis par la crue de 1620, l’urbanisme de Montignac porte à croire que cette cité conserva un rôle majeur sur cet axe, seuls les déplacements de grandes formations militaires privilégieront le passage par Terrasson. »

– « En outre, dit un arrêté du Conseil de préfecture de la Dordogne, en date du 20 septembre 1811, afin de donner au grand pont de Terrasson dont la voie est très étroite, toute la viabilité et la sûreté que comporte le passage de ce point, il est absolument nécessaire de faire démolir : 1° une petite tour octogonale de 2 à 3 m. de diamètre, sise à l’entrée du grand pont de Terrasson et attenante à la maison Bouquier, culée droite du grand pont ; 2° un petit corps de garde appartenant à la ville de Terrasson, lequel acte construit en 1794 sur la première pile, tête amont de la rive gauche du grand pont. La démolition du corps de garde ne souffrit aucune difficulté, bien que le maire de Terrasson, M. Demery, par une lettre du 5 janvier 1812, adressée au Préfet, fit toutes réserves au sujet de l’indemnité pouvant revenir de ce fait à la commune. Mais il n’en fut pas de même de la petite tour octogonale, située à l’angle de la maison Bouquier. La démolition de cette tour fit, en effet, l’objet d’une réclamation en indemnité, à la suite de laquelle une enquête administrative fut prescrite afin de rechercher si, par son âge, ladite tour pouvait être considérée comme anticipant sur le domaine public, ou comme une propriété à acquérir pour donner à la voie publique la largeur nécessaire ».

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